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Préambule

Je n'ai pas spécialement envie d'écrire ce compte rendu. Je me fais un peu violence, en pensant à ceux de mes 2 précédents Grands Raids: je les relis de temps à autres plus ou moins partiellement avec beaucoup de plaisir.

1er marsretour en haut de la page

7h, ouverture des inscriptions pour la 20ème édition du Grand Raid de la Réunion. Au saut du lit, je me précipite sur le PC pour découvrir que le site est déjà saturé...La diagonale des fous attire de plus en plus de fous ! Effet 20e édition ? Après avoir essayé toute la journée, je ne parviendrais à m'inscire que vers 17h avec beaucoup de chance. Christian fait de même dans la foulée. Ouf ! Même ça c'est dur : 1ère étape franchie. Beaucoup resteront sur le carreau, j'imagine la frustration ! Le quota d'inscriptions hors Réunion est atteint dans la journée. Il faut maintenant s'y mettre, s'y tenir et surtout éviter les blessures qui me pourrissent l'existence régulièrement depuis 3 ans.

11 septembreretour en haut de la page

Sur un pas, en marchant en sortant de la douche après une séance cool pourtant, violente douleur sous le mollet droit ! Je boite bas. Tout s'effondre malgré le réconfort familial. Je me dis que ce n’est pas possible, je ne peux pas me blesser en marchant, MERDE ! La douleur ne me quitte pas de la soirée, je glace et je comprime pour la nuit. Le lendemain, miracle, plus rien, plus de douleur, incompréhensible ! Par prudence, j'annule la sortie montagne prévue le we suivant, c'était la dernière du planning. Elle me manquera un peu. Je consulte : pas de trace de lésion...Le moral remonte après cette grosse frayeur.


22 septembreretour en haut de la page

Rando pépère avec nuit en refuge avec les potes. Arrivés relativement tôt dans l'après midi au refuge de l'Etang d'Araing. Un petit "gofast" avec Christian au sommet du pic de l'Har au dessus du refuge à bon rythme me redonne confiance.

06 octobreretour en haut de la page

Dernière séance de course à pied: les sensations sont au rendez-vous. Une bonne sortie vélo le lendemain. Je suis soulagé: sauf catastrophe je serai au départ du Grand Raid ! Poids de forme olympique (78kgs soit 1kg de moins qu’en 2008).

13 octobreretour en haut de la page

A l'aéroport avec Gino en famille Nous décollons pour la Réunion, il me (nous) tardait tant...François nous accompagne cette année, en mode vacances. Il vient découvrir l'île et sera le pilote de l'assistance. Il vivra donc la course au plus près, lui avec qui j'ai si souvent parlé de cette course. Ca me fait bien plaisir qu'il soit là.
Accueilli par Gino et sa petite famille et Robert Chicaud président de l'association Grand Raid pour un pot de bienvenue. Echange de petits cadeaux avec Gino qui nous briefe sur le parcours et ses temps de référence à la seconde près ! Bonne surprise nous récupérons un kangoo quasi neuf. Ca tombe bien, malgré son grand volume, tout rentre juste : à 5, nous sommes chargés comme des bourricots ! Direction notre QG d'Etang Salé les Hauts, par la nouvelle route des Tamarins : que de temps gagné ! Rien n'a changé depuis 2008 dans l'agréable maison de Sabine & Fred (Encore un grand merci pour la réservation) où nous accueillent la maman de Sabine & Michel. On y est, tout le monde est heureux, il fait beau. une sieste et un saut à la plage pour commencer. Reco au col du Taïbit

Les jours suivants sont consacrés à faire visiter l'ile à François (reco du col du Taibit, volcan, Dos d'ane sous un soleil magnifique...) et à lui faire apprécier les spécialités locales : rhum, dodo et rougail saucisse dont il devient un éminent spécialiste ! Et surtout à guetter les prévisions météo assez pessimistes : la tempête Anaïs a l'intention de taper à l'incruste. On a vraiment du mal à y croire, il fait si beau...

17 octobreretour en haut de la page

Retrait des dossards

Le jour du retrait des dossards. La tension monte...Plage pour les filles et petit repas entre hommes à St Denis puis direction le stade de la Redoute pour commencer à rentrer de plein pied dans l'aventure ! Files d'attente traditionnelles (1 pour le dossard, 1 pour les T-shirts...) : pas super carré comme orga qui en est pourtant à sa 20e édition.
On quitte le stade au moment où la star Kilian Jornet arrive. Retour à la plage pour récupérer ces dames. Pierre-Etienne un prof de sport nous interpelle pour nous souhaiter bonne chance, parle du Grand Raid, et finalement nous donne rdv à Colorado 48h après le départ pour une bière !!! Il nous sent bien...On a beau lui expliquer que c'est peu probable, il nous voit plus beaux qu'on est !

18 octobreretour en haut de la page

Affiche officielle 18 au 21 octobre 2012
20e édition de la Diagonale des Fous
170 Kms et 10800m de D+
Carte du parcours

Jour J, jour tant attendu et tant redouté. Les prévisionnistes météo avaient vu juste: il pleut vraiment beaucoup ce matin ! Je n'imagine pas attendre le départ sous un tel déluge et puis j'ai peur que mes pieds fragiles partent en charpie très vite : les pieds, le nerf de la guerre avec la tête...Faudra faire avec. A l'heure de préparer les sacs, la pression monte un peu plus et il me faudra 2h pour tout finaliser: peur d'avoir froid au volcan ou la nuit, d'être trop chargé, quelles chaussures ? Toute une petite stratégie en mettre en place en fonction des temps de passage estimés. La pluie a cessé en fin de matinée. L'aprem passe très vite: petite sieste d'une heure, préparation des bonhommes avec soin particulier pour les pieds. Pas de concours de pâtisserie cette année, en 4 ans, j’en connais qui n’ont pas progressé . Copieuse collation puis c'est le départ vers l'arrêt de bus. Pour cette édition on innove: on prend la navette de l’orga pour rejoindre le départ. 2h pour faire 50 kms, impossible de fermer l'oeil. 1ère épreuve: la radio crache la danse des canards, Mireille Mathieu et d'autres merdes de ce style.

Avant le départ

Nous voilà sur place, rebouchon pour rentrer dans le sas de départ...On ne se rend pas vraiment compte qu'on est assez loin de la ligne. Bref, de nos 3 participations c'est la moins concluante au niveau de l’organisation personnelle du départ. Bon, en tout cas on y est ! Les filles & François viennent d'arriver, postés quelque part sur la route pour nous voir passer. La bonne nouvelle est qu'il ne pleut pas. Robert Chicaud fait son speech et annonce néanmoins l'humidité pour la nuit et le lendemain comme prévu. Ensuite ça devrait être pas mal. Gino nous retrouve pour un petit coucou et va se placer.
Ca commence à bousculer. Objectif 50-55h,arriver ensemble sans se fracasser. Je ne suis pas serein, beaucoup moins confiant qu'en 2008 surtout que le parcours annoncé est plus long de 20-25 kms et de 2000m de D+. Mais j'ai confiance en mon expérience et mon mental ! Je suis prêt à souffrir et seule la blessure me fait peur. Les chiffres : 170kms pour 10800m de D+, plus de 2600 grands raideurs au départ, 50% d'abandons pronostiqués. Le décompte est lancé, ça part avant la fin ! Départ toujours aussi magique ! Jouer des coudes, surtout ne pas tomber et profiter du moment, se considérer comme des chanceux (alors qu’on va souffrir !). A peine partis depuis 5mn, il se met à pleuvoir, il fait chaud, c'est pas trop gênant...pour l'instant. 5 kms de route nous attendent, la foule est massée tout du long quasiment sans discontinuer, c'est génial. Les filles nous interpellent de justesse !

L'ambiance et les encouragements donnent des ailes mais faut pas s'enflammer la route est loooooongue. On adopte un rythme pépère comme établi. La pluie redouble, les vestes sont de sortie. On ne les avait pas utilisées de l'été ! 1h de course pendant laquelle je suis très attentif aux sensations, toujours la peur de la blessure. J’ai remarqué quelque chose de bizarre depuis cette année...dès qu’une petite gène ou douleur semble apparaitre, je bois et elle disparait...C’est grave docteur ? En tout cas, ça sera encore le cas sur toute la course. Passage dans les champs de canne avant d’arriver au Chemin Ceinture (km 7, D+ 230m), 1er ravitaillement 1er pointage, 1er bouchon, on perd déjà 10mn. S'en suit une longue portion de route forestière descendante sur laquelle il est facile de se laisser griser puis on rejoint la route forestière de Mare Longue qui enchainée à celle des Camphriers mène au sentier du volcan. A partir d’ici et pendant 80 kms (jusqu’à Marla), parcours identique à celui de 2008. C’est bon d’avoir des répères. Rythme toujours tranquille : marche rapide sur cette partie à profil légèrement ascendant. Il pleut et il pleut.... Ravitaillement du sentier du volcan, nous payons déjà notre départ prudent, plus que des bananes à manger. J'embarque 5 ou 6 morceaux pour la montée que je prendrais en alternance avec des gels. La montée nous fait également regretter notre départ: ça bouchonne dans le sentier ! on perd un temps fou ! J'entends même un mec parler de barrières horaires: le choc ! Par contre, certains doivent déjà regretter leur départ rapide, après seulement 4 ou 5h de course, des mecs agonisent déjà...je ne comprends pas bien la tactique. Malgré tout, je ne me sens pas super bien, gêne au ventre, et dès que ça avance, je trouve même le rythme assez élevé parfois. Bref j’ai pas la grosse forme...Je gamberge un peu, l’aventure intérieure commence. Arrivée au petit jour (6h) à Foc Foc (km 29, D+ 2500m), la désolation là aussi au niveau alimentaire, ravito ...que des biscuits et des bananes ! 1h30 de retard sur les prévisions pas spécialement optimistes. A priori nous sommes classés 2000e, on aurait perdu 700 places entre les 2 ravitos ! ça me parait énorme, bug informatique ? Je ne suis pas là pour la perf, mais ça me met un sacré coup au moral. La bonne nouvelle est que la pluie s'est arrêtée. J'en profite pour enlever mon slip (mais je remets le short ;-)), j'ai l'entrejambe et le cul tout irrités, mon sous-short devrait remplir le rôle. Mon plus beau slip ! un kalenji spécial sport ! Après coup il me semble avoir déjà subi ce désagrément sur une sortie longue avec ce même calbut. La 1ère grosse difficulté est maintenant derrière nous: Direction la route du volcan au petit trot, dans la brume, c'est dommage, de jour cette partie est vraiment magnifique. En 50mn, nous voilà au ravitaillement de la route du Volcan (km 35, D+ 2600m) où se massent bon nombre de spectateurs et d'assistants personnels. La partie la plus facile du GR nous attend. 30kms entre le volcan et Mare à boue.

On a repris 150 places: à ce rythme on est dans le top 100 dans quelques heures . Après une soupe chaude dont je rêve depuis un bon moment, nokage (du verbe noker) des pieds et changement de chaussettes. Plaine des sables avalée en trottinant, toujours dans la brume.

Je profite de la montée du rempart des basaltes pour crémer mon entrejambe et mon cul tout en marchant : ça doit être marrant à voir pour ceux qui me suivent... Piton Textor (km 42km, D+ 2700m) est assez vite rejoint (encore 100 places de gagnées en 1h30), on arrive à entrevoir un coin de ciel bleu, mais ça ne va pas durer, la pluie va nous accompagner jusqu'à Mare à Boue, où l'assistance nous attend. En plus des paysages normands, on a droit aussi au climat normand. Entre piton Textor et Mare à Boue Les chemins sont gras et boueux, les pieds souffrent, la tête aussi ! Néanmoins on arrive à trottiner entre les flaques et les mares. Interdiction de glisser sur le chemin d'un mètre de large entre 2 clotures de barbelés vers le chalet des Patres: découpage assuré ! 50e km, enfin Mare à Boue, fin de la « course à pied », début de la rando... Pascale, Sabine & François ont attendu sous la pluie, qui s'arrêtera à notre arrivée. Si j’en crois leurs commentaires (puis plus tard les photos) , Christian semble plus frais que moi. Logique, je ne me sens pas au mieux mais cette pause va me faire du bien. 20 mn, le temps de changer de chaussettes et de chaussures (les Mizuno Cabrakan 3 à la place des Asics Trabucco). Je suis content d’avoir laissé une paire de chaussures aux filles. L’assistance est aux petits soins. Bisous et rdv au Maïdo. Direction le ravitaillement de Mare à Boue (km 52, D+ 2800m), mini campement militaire dont un bourbier marque l'entrée. Pas terrible...Malgré l’arrêt, on gagne 8 places. Pâtes et poulets déguelasses, je me force à manger. Il y a même un petit stand supradine !!! Je m’en fais 3 verres. Je crains un peu la suite: montée vers le gite du Piton des Neiges via le coteau de Kerveguen : j'y avais souffert en 2008. En effet elle va être très éprouvante. Beaucoup y laisseront des plumes et le reste. Moi, juste quelques plumes. Christian pronostique « cette édition va rester dans les annales » puis plus tard me dira "Si on finit, c'est un exploit...". Putain déjà que j'étais pas très bien, il m'achèverait presque ! Pour ma part ça sera « c’est la dernière fois... ». Je tente de me reprendre : «le mental... ». L’aventure intérieure continue. La pluie nous fout la paix mais la brume est toujours présente. C'est dommage pas de paysage à admirer, juste à se concentrer sur les pieds. Eviter la bouillasse, les glissades et la trempette. Très fatiguant... 2 petites pauses seront nécessaires. Regroupement de quelques coureurs. Les visages sont marqués.

Boue, boue...

Cette 1ère partie a fait de gros dégâts. Malgré la fatique, je pisse encore « blanc », Christian ausssi d’ailleurs : c’est bon signe. On est assez synchro pour pisser, et donc on compare.... Contrairement à 2008, la vue sur le gite du Piton des Neiges (km 65, D+ 3900m) est dégagée, on y reste très peu de temps d’autant qu’on sera rationnés en eau et en soupe pour en garder pour le trail du Bourbon du lendemain : ça me gave sachant qu’il reste encore potentiellement 1000 personnes à ravitailler. 100 places gagnées encore. Allez, dans 1h30-2h on devrait être à Cilaos, mais d’abord faut s’envoyer la terrible descente du bloc. Elle ne passe pas trop mal, mieux qu’en 2008 il me semble : on se fait beaucoup moins doubler. La partie bitumée entre la fin de la descente et le stade est très pénible et me paraît interminable. J’ai l’impression qu’on visite inutilement Cilaos. Ca laisse le temps d’apprécier les encouragements des spectateurs et accompagnateurs. Toujours bon à prendre pour le moral.

Cilaos (km 72, D+ 4000m). On dit toujours « la course commence à Cilaos »,mais pour beaucoup et plus que jamais cette année, elle s’y arrête. On a gratté 80 places. Visiblement, les podos et les kinés sont pris d’assaut. Plus de 100 personnes dans la liste d’attente des podos...content d’être autonome. Les minutes passées à prendre soin des pieds sont reprises ici. Certains y passeront plusieurs heures prenant même le risque de jouer avec les barrières horaires. On récupère nos sacs d’assistance au milieu du terrain de foot : avec ce qu’il est tombé toute la journée, j’espère que tout le monde avait bien protégé son rechange (on devait nous fournir des sacs pour ça...) : lamentable pas d’autre mot, pas d’excuse...il y a plein de tentes de l’armée sur le terrain. On prend le temps pour se changer complètement dans une tente, préparation de la tenue « nuit », je fais la révision complète des pieds, c’est long mais indispensable. Niveau chaussures, les Mizuno Cabrakan 4 remplacent les Cabrakan 3. Christian a la chance que ses pieds le laissent tranquille. J’embarque la 2e frontale que j’avais prévue pour cette 2e nuit. Coté ambiance, c’est pas terrible : dans la tente 2 ou 3 mecs essayent de fermer un œil mais c’est mission impossible car la sono est à fond juste à côté. Peu de respect des coureurs de la part de l’orga encore une fois...

Le repas « chaud » de la froide cantine n’est pas inoubliable. La prestation a baissé en 4 ans. Ambiance tristounette, tout le monde accuse le coup, sauf un coureur au look USA de la tête aux pieds qui semble serein et réchauffé avec son petit débardeur étoilé. On ne traine pas : il reste 100kms. La nuit est tombée. Pas de pointage, cette année à la sortie du stade...On a dû y rester 1h30 ( ?). La descente vers la cascade Bras Rouge se fait dans le brouillard super épais. Cette année, cette partie passe bien. 2 ou 3 gués sont à traverser, et je crois que j’ai posé le pied dans l’eau au passage le plus facile. Je râle bien-sûr mais mes Cabrakan 4 s’avèrent en effet relativement étanches,ce que j’avais déjà pû apprécier. Rythme tranquille qui nous permet d’arriver au Pied du Taïbit (km 79, D+ 4500m) sans encombre. Ravito express et en route pour le fameux col du Taïbit, celui qui fait très mal (la partie cascade Bras rouge commence à vous user, et le Taïbit vous assène le coup de grâce). L’ami Gino y laisse des plumes tous les ans alors qu’il connait le moindre caillou. Au niveau de la tisane « ascenseur » , Christian piste la tente vide qui nous tend les bras de l’autre coté du sentier et demande si on peut la squatter. Super idée, 1ère pause dodo à l’abri de l’humidité, 25mn qui nous ont fait un bien fou, 24h après le départ. Comme ça, forcément, la montée paraît plus facile, et en plus il fait bon. Je profite de l’allure touriste pour commencer à dépiler les textos ! Le fan club est à fond : amis, famille et collègues. Y a pas à dire, ces petites choses redonnent du courage.

Bascule sans problème dans Mafate pour 35 kms magnifiques mais difficiles. Je me pose 2 mn à Marla (km 85, 5400m D+) où on a gagné 300 places (surtout dès le départ de Cilaos sans doute) pour ajuster les straps aux pieds. Pour notre 3e passage à Marla en 3 participations, le spectacle est toujours le même à la nuit bien entamée : dortoir géant à même le sol, les couvertures de survie scintillent à la lueur des frontales. Pour l’avoir testé en 2008, c’est pas terrible, il fait humide et le froid tombe. Les raiders qui s’affairent autour du ravito ont de sales gueules, on ne doit pas y échapper. Le froid se fait sentir à l’arrêt, ravito express encore, puis on attaque une partie inconnue pour nous via la plaine des Tamarins. Un raider qui nous accompagne nous fait découvrir la source de la rivière des Galets. Très vite, je ne suis pas bien, j’ai sommeil à nouveau : la petite sieste date déjà de 4h. D’après Christian je râle beaucoup sur cette partie. Je n’avance plus, j’ai sommeil, je commence à halluciner : je vois des enfants traverser le sentier (la végétation) et même une dame en blanc qui au loin secoue une nappe blanche (rubalise flottant au vent) ! La pause « grosse commission » ne me fait du bien qu’au ventre...Pas synchros pour ça donc on ne peut pas comparer . Les jambes ne vont pas trop mal à ce stade de la course mais une grande lassitude m’a envahi et je veux dormir.

Je tente de rassembler les images positives que j’avais mis dans un coin du cerveau avant le départ, je pense à mes filles à qui j’explique « le mental ». La meilleure explication est là. A moi d’assurer ! L’avenure intérieure bat son plein. Je bois beaucoup, je mange les amandes que j’adore, tente de m’occuper. J’essaye le mp3 que je range aussitôt : je ne supporte pas de ne pas m’entendre marcher. J’ai envie de me poser, Christian insiste pour qu’on avance parce qu’on est en plein vent et qu’on ne voit pas d’endroit propice à l’arrêt, donc on avance, tant bien que mal. La courte mais raide montée au col des Fourches se fait au ralenti. Et puis au col, un épisode qui va me réveiller : un gendarme du PGHM et 2 secouristes cherchent un raider qui aurait chuté au col mais n’arrivent pas à le localiser. Le passage du col est lugubre : en contrebas du sentier, on n’aperçoit que du noir, ça fait froid dans le dos. Le gendarme nous explique que des raiders étaient censés se relayer pour attendre les secours afin de montrer l’endroit de la chute.

Certains n’ont pas jugé bon d’attendre, ce qui a retardé les recherches. Mentalité de merde. On apprendra plus tard qu’il ne sera retrouvé qu’au petit matin, mort sans doute sur le coup. Mort de sa passion. Ca aurait pû être n’importe qui. RIP ami trailer. 3e mort en 20 ans sur le Grand Raid. 3 morts de trop. La descente vers le parking du sentier scout se fera tout doucement sur un chemin grassouillet, refroidis par ce dramatique accident. L'aventure intérieure prend une tournure que je n’aime pas du tout. Faut à tout prix, penser à autre chose. Le ravitaillement dit du Sentier Scout (km 94km, D+ 6000m), installé en bord de la route, ressemble à un hôpital de campagne avec ses blessés et ses zombies... Comme à chaque pointage, je regarde notre classement, petit détail qui me booste le moral : on ne va pas vite mais les autres non plus ! 140 places gagnées alors que je suis au plus mal, c’est bon ça ! On décide de se poser pour dormir un peu, il est 4 h du mat. Vivement que le jour se lève, je sais que ça va me redonner la pêche. Beaucoup de monde partout, les 2 tentes qui servent de dortoir sont pleines. On regarde derrière les tentes et les voitures s’il y a moyen de s’allonger. Une secouriste qui voit notre manège, nous le déconseille : « tout le monde pisse là.. ». On finit assis en boule contre la calandre d’une voiture de flics. La secouriste a pitié, elle nous porte 2 couvertures de survie chacun et c’est dans cette position improbable et inconfortable qu’on dort royalement 10 mn. Mais, vite ! faut partir d’ici, un plein d’eau plus tard, on attaque le sentier scout. La gentillesse et l’attention de la secouriste feront que cette sieste pourrie restera un bon souvenir.

Lever du jour

Je crois que c’est à partir de là que le mal aux épaules commence à se faire sentir. Comme je me force à boire beaucoup, je fais le plein à chaque fois de peur de manquer et le sac pèse : toujours pas au point de ce côté-là. Le début de trail de la Mascareigne qui vient de partir emprunte également ce sentier ce qui inévitablement provoque quelques bouchons : nous, on marche, les autres courent. Certains prennent beaucoup de risques pour nous doubler dans des passages assez chauds. Personnellement je ne me serre que coté paroi . On s’arrêtera pour profiter quelques instants du lever du jour magique entre Salazie et Mafate... C’est aussi pour ça qu’on est là. Tous les engagés de la Mascareigne ont dû nous passer sur ce sentier magnifique avant que les parcours des 2 courses ne se séparent à la Plaque. On passera un moment avec un local né à...Montauban ! Passage de la passerelle « 1 piéton à la fois » (un classique) avant d’arriver tranquillement à Ilet à Bourse (km 102, D+ 6200m) où on s’octroie une sieste de 15mn sur une bache étalée en plein soleil, supportable et bienvenu à cette heure matinale. Les pipelettes à côté de nous, nous dérangent à peine. On troque le pyjama contre la tenue de jour, on sent qu’il va faire chaud voire même très chaud. Ca cogne à Grand Place

Grand Place (km 105, D+ 6300m) n’est qu’à 1h et c’est quasiment plat : un peu de répit avant le 2e très gros morceau de la course. On a reperdu 70 places. Sur ce ravito comme sur tous les autres, je mange de tout et n’importe quoi, tout ce qui se présente : chocolat, soupe, biscuits, banane, orange..., aucune rigueur de ce coté-là mais aucun problème digestif à déplorer. Entre chaque ravitaillement, je tourne aux gels et aux amandes. Rien ne m’écoeure ! Il doit être 9h quand on repart de Grand Place, sous un soleil de plomb maintenant: je sue à grosses gouttes d’autant que ça grimpe sévère jusqu’à la descente de la Roche Ancrée. Vue magnifique encore, petite pause pour s’en mettre plein la vue. En 2008, on avait fait cette partie dans l’autre sens (« le mûr »). D’après nos estimations on devait y passer de nuit, et je ne suis pas mécontent d’être un peu en retard...Claude Escots, un des très bons trailers français arrive. Etonnés de le voir à notre niveau, je ne peux m’empêcher de lui demander comment se fait-il ? Il a passé quelques heures à Marla victime de problèmes digestifs, comme quoi.... Finalement il nous collera 8h sur les 70 kms restants. A la Roche Ancrée, la rivière des Galets est une aubaine pour tous les trailers en surchauffe : quel bonheur de pouvoir se rafraîchir à grandes eaux, certains se baignent. Maintenant c’est 2000m de D+ au programme pour sortir de Mafate. La montée vers Roche Plate via le sentier Dacerle en plein soleil est terrible. Chaque passage de gué donne lieu aux mêmes scènes : trempage du T-shirt et de la casquette, de la fraicheur bienvenue.
Dans le dur Je suis vraiment à la peine, Christian devant moi semble facile. Je ne veux pas me mettre dans le rouge et faire monter le palpitant avec cette chaleur. La succession de marches est usante. Il nous faudra quasiment 4h pour atteindre Roche Plate (km 115, D+ 7500m) depuis Grand Place. Nous avons néanmoins repris 40 places : Pauline me met la pression en voulant qu’on rentre dans les 1000 mais j’ai besoin de dormir et je m’allonge par terre au milieu des autres comateux pour 10mn réparatrices. Je crois que c’est la seule fois qu’on ne sera pas synchro pour dormir. Passage de La Brêche

La partie Roche Plate-La Brêche (passage vertigineux mais magnifique) permet d’en prendre plein les yeux mais très vite, les nuages enveloppent le Maïdo, ce qui n’est pas pour nous déplaire : même si on se prive d’une vue grandiose, il fera moins chaud. Dommage aussi pour l’assistance qui nous attend là-haut et qui ne peut profiter du panorama. Il nous tarde de les voir. Mes doigts de pieds commencent à à me rappeler à l’ordre, j‘ai commandé du compeed par téléphone et je compte réparer tout ça à la sortie du sentier. Cette montée du Maïdo est moins pénible que prévue (au soleil ça doit être une autre histoire), jalonnée tous les 25%. La moitié est faite Moins pénible, tout est relatif, il faudra tout de même 2 petites pauses de 2mn pour en venir à bout. J’ai maintenant super mal aux épaules. Sur la fin on entend les clameurs des spectateurs massés à la sortie du sentier, ça motive. Cette arrivée est magique, digne du Tour de France en montagne, chaque coureur sortant du sentier est acclamé...Psychologiquement, la fin de ce tronçon fait un bien fou, persuadé que le plus dur est fait. Nous sommes contents de voir Pascale, Sabine et François. Ca a l’air réciproque ! Le compeed est au rdv: Pascale a géré la pharmacie et en plus j’ai même le choix, c'est 'royal), assistance est encore parfaite. Au milieu de la grosse effervescence, je refais mes pieds, on raconte nos joies et nos peines.

On repart vers le ravito Tête Dure (km 121, D+ 8600m) à 20mn de là. François nous accompagne en nous filmant. Pointage (+40 places encore), soupe et c’est reparti pour 1700m de D– qui devraient malmener les quadris. La brume nous empêche d’apprécier la vue sur Mafate qu’on surplombe pendant quelques kms. On s'enfonce dans la brume D’après l’alti de ma suunto, on descend très peu en zigzaguant dans une espèce de forêt. On monte de quelques mètres parfois même. C’est usant et je comprends vite que cette partie va être très longue. La nuit tombe (la 3e), le brouillard est de plus en plus épais. On ne voit maintenant plus rien, on devine une piste avec des marches faites de rondins et ça dure et ça dure. Je pense qu’on va 3 fois moins vite qu’on pourrait s’il faisait jour...Comme on marche, je m’occupe en lisant les textos. On fait partie d’un petit groupe et tout le monde sature de ce chemin de merde. Pourtant pas technique , c’est surtout la combinaison nuit + brouillard qui use et puis je pense que ceux qui ne le connaissait pas ne l’avaient pas imaginé aussi long. C’est à cet endroit là que ma frontale commence à donner des signes de faiblesse. J’ai laissé l’autre aux filles au Maïdo et comme un con, je m’aperçois que je n’ai pas de piles de rechange. Coup de bigo à François. Je m’énerve parce qu’il n’entend rien, je suis surtout remonté contre moi. A peine rentrés à la maison, ils doivent repartir pour un rdv à Ilet Savanah (qu’on croyait). Et jamais nous arrivons à Sans Souci....c’est toujours « dans 5mn », « vous y êtes »...Usant...

A Sans Souci (km 134, D+ 8700m), la foule nous acclame, ça remonte un peu le moral. On apprend que la 2e base de vie n’est plus à Ilet Savanah mais au lieu-dit Halte là et je rappelle François pour lui expliquer d’après des indications d’un bénévole. Re-énervement...désolé mon ami On met ça sur le compte de la fatigue, parce que là j’en ai plus que marre. Christian aussi apparement. Seul petit réconfort, 2 petites crèpes bien chaudes et puis on est passé sous les 1000. A la sortie de Sans Souci, on devine le stade de Halte-là éclairé, un peu plus haut de l’autre coté de la Rivière des Galets qu’on traversera à sec avant de se taper une petite remontée très raide jusqu’au stade. Cette partie n’est pas inoubliable. Il est 21h à peu près, François appelle pour dire qu’ils sont paumés...Re-re-....Bref, ils arrivent au stade en même temps que nous.

Grosse pause au stade de Halte-là

Halte-là (km 140, D+ 9000m) Nous sommes agréablement surpris par l’organisation : on s’installe sur le stade pour se changer et faire la révision, les assistants à disposition. On profite de la voiture pour une sieste de 45mn, apparement j’ai ronflé comme un sonneur (mais je me méfie de ces gens qui exagèrent) : en tout cas, j’ai bien dormi ! On se restaure avec un plat chaud (mieux qu’à Cilaos mais moins bien que Deux Bras 2008) , un café et on repart. La suite s’avèrera pénible et sans intérêt. Il parait qu’en plein jour c’est encore plus laid. Le passage à la grotte de Kalla nous offre un spectacle surréaliste : on se retrouve face à face avec la photo du pape en pleine nuit ! Au bout d’un moment, Christian veut qu’on s’arrête dormir, parait que je zigzague et qu’on raconte n’importe quoi, la dernière sieste date déjà de 5h...On se pose juste à l’écart du chemin avant d’arriver à la Possession. On sera d’accord pour dire que c’est là qu’on dormira le mieux : c’est bien plat, confortable et il fait bon. Il doit être 3h du mat.

On se réveille synchros là-aussi 45mn plus tard. La pause nous aura fait perdre 60 places à La Possession (km 150, D+ 9600m) mais on est toujours dans les 1000. Ici c’est pas joyeux non plus, encore un paquet de zombies, ne pas s’attarder. On a déjà battu nos records de distance et de D+. Les jambes vont bien mais la grosse lassiture s’est vraiment installée, celle qui fait qu’on a envie que tout s’arrête, celle qui fait que le mental doit prendre le relai. Un mélange de soupe et de riz, un café et on repart pour découvrir le fameux chemin des Anglais.
Chemin des Anglais Ca grimpe sévère au début, puis ça se calme, une ravine à passer alors que le jour se lève, ça n’en finit pas. Les gros pavés abrasifs font bien chauffer les pieds. Il parait qu’en plein soleil c’est l’enfer, je veux bien le croire.

Délivrance à la Grande Chaloupe (km 157, D+ 10000m). Le pointage électronique est en panne, ce qui fera douter tous les gens qui nous suivent et même les filles et François. Il reste 15 kms à parcourir et 900m de D+ à gravir. C’est dans la poche. Depuis que le jour s’est levé, la tête va mieux, le rythme est même plutôt correct dans cette dernière montée mais voilà...j’ai encore sommeil. Je m’aperçois que je divague en commençant à dire à Christian que je vais passer à la maison dire bonjour à ma fille Mathilde...Je m’allonge et je dors profondément 10mn. Le reste de la montée jusqu’au Colorado (km 166, D+ 10900m) ne présente aucun intérêt.

Sur ce dernier ravito, des petits toasts de saucisson me font de l’oeil. Encore un plaisir simple qui donne du baume au cœur. Nous avons quasiment 12h de retard sur le rdv fixé par Pierre-Etienne mais nous sommes maintenant passés sous les 900, dans le 1er tiers. 2 petites filles nous font signer des autographes avant d’attaquer la descente !!! On sait qu’il nous reste 1h15-1h30 et qu’il n’y pas plus de montée. Une formalité après tout ce qu’on a déjà enduré. On savoure, on pose pour une dernière photo.
Stade de la Redoute en point de mire Qu’il est beau ce stade de La Redoute vu d’en haut, le panneau Saint Denis est synonyme de descente terminée, il nous reste 500m. Accolade sous le pont comme en 2008, avant de finir au petit trôt acclamé par les spectateurs venus en nombre ce dimanche matin. Les filles et François sont là. Ils sont ausi heureux que nous, Pascale scande « Tou-lou-sains », « Tou-lou-sains » un dernier bisou et nous passons la ligne au « sprint » de peur de se faire doubler par une concurrente lancée à nos trousses et qui aura la délicatesse de passer Christian après la ligne mais avant le pointage. Voilà c’est fini. L’arrivée tant attendue mais paradoxalement avais-je envie que tout s’arrête comme ça, brutalement ? Oui, quand même un peu

On en termine

60h27, 877e, soit 34h après Kilian qui a écrasé la course ! Chrono décevant à mes yeux mais on fait partie des 50% de finishers, statistiquement un de nous 2 n’aurait pas dû voir La Redoute. L’objectif est néanmoins atteint, cette 20ème édition étant qualifiée de « la plus dure de toutes », il y a quand même de quoi être satisfaits. Ca été très dur physiquement, mentalement, trop long, très cassant mais Les Guerriers Balubas (© Cyril & LV88) ont survécu : Je pense même que s’il avait fallu faire 20kms de plus, on les aurait faits...
! En 2008, j’écrivais on l’a fait, en 2012 logiquement je dis on l’a refait !

Finishers !

C’est une délivrance, une immense joie : je repense à tous les pépins physiques, les moindres douleurs qui font douter, les derniers entraînements effectués la boule au ventre de peur de me blesser. Et dire que je finis sans une douleur...

Massage sur le stand Kalmanou !

On s’installe pour le repas d’après course et une bonne bière bien méritée en arborant fièrement ce t-shirt jaune de finisher (pourtant faut avouer qu’il n’est pas beau...) avant de rejoindre Gino & Sonia sur le stand Kalmanou (Beaume artisanal aux huiles essentielles à la texture hyper agréable). Malgré la déception de son abandon Gino nous félicite chaudement, ça fait plaisir. On a droit à un massage réparateur, Gino s’occupant d’une jambe et Miss Kalmanou (désolé j’ai oublié ton prénom) de l’autre même si on a qu’une envie : dormir, 2h30 de sommeil en 3 nuits, le déficit commence à se faire sentir. Récupération du Kangoo tagué et crevé...à ce moment là on a vachement envie de changer une roue...François gère. On décolle enfin vers Etang Salé. Rideau.

assistance Temps de passage Profil du parcours

Début décembreretour en haut de la page

Ecrire ce CR a été plus long que la course...ça me disait trop rien, je ne voyais pas ce que je pouvais écrire de différent par rapport à 2008. Mais je me suis forcé, pour avoir une trace et finalement j’y ai pris du plaisir, plaisir de revoir défiler les bons moments et même les moins bons... Après une coupure complète d’un mois j’ai repris la course à pied, pépère. Je me blesse à nouveau. Ca recommence, ça me mine. Alors qu’il me semble avoir bien récupéré (j’ai repris 4 ou 5 kgs), il est sans doute probable que j’y ai quand même laissé quelques plumes... L’avenir le dira.

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Les trophées