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Mardi 17 octobre 2006

Après 6 mois d'entraînement, c'est enfin le départ tant attendu. Le moral est au beau fixe, pas de pépins pendant la préparation, je suis reposé et au poids de forme. Les 2 sacs sont prêts et bien pleins. Des affaires en double bien réparties entre les sacs au cas où un des 2 s'égare...les chaussures et le sac de la course voyageront avec moi. On ne sait jamais. On retrouve Christian et Sabine à Orly pour le vol du soir vers St Denis. On repère ici ou là des potentiels grands raiders comme nous qui attendent l'avion : les sacs Raidlight, Salomon, et autres montres Polar sont de précieux indicateurs. On discutera d'ailleurs avec des italiens qui eux aussi nous ont identifiés. Voyage sans encombre, pas trop mal dormi pour une nuit en avion (merci Stilnox).

Mercredi 18 octobre 2006retour en haut de la page

Attente retrait dossards On a tout !

Arrivée à St Denis, récupération de la voiture de location : agréable surprise c'est un Picasso diesel bien spacieux pour nous 4 et nos bagages mais qui s'avèrera un "peu" juste en montée (un vrai veau en vérité). Il est un peu tôt pour manger donc une petite balade dans St Denis et son agréable petit marché nous dégourdit les jambes. On se restaure ensuite avec un espadon/spaghettis : on refusera même le planteur de bienvenue, mais pas Pascale et Sabine qui sont déjà dans l'ambiance locale. C'était pourtant très tentant...
15h30 : c'est l'heure du retrait des dossards au stade de la Redoute. On est en avance mais c'est déjà l'effervescence.... Organisation bien rodée mais malgré tout, c'est long et le soleil cogne...après 1h d'attente, le précieux sésame est dans la poche. On y est ! Le Grand Raid commence ! Puis, détour obligé par les partenaires du Grand Raid qui nous chargent de leurs produits : casquette saharienne, T-shirts, lentilles de Cilaos, riz complet, crèmes pour les pieds, crème solaire, répulsif à moustiques (eh oui c'est l'année du "chick" qui a fait peur à beaucoup de "zoreilles"), savon, dentifrice, brumisateur...j'en oublie, sans doute. On aperçoit quelques favoris, la presse et la télé sont là : le Grand Raid est un évènement majeur à la Réunion. Un dernier arrêt à la boutique du GR pour l'achat de l'affiche souvenir (Photo 1) et c'est reparti direction Etang Salé les Bains, notre QG. On goûte ainsi aux joies de la circulation sur l'île, cool, ça rappelle Toulouse, aux heures de pointe ! Nouvelle bonne surprise, la maison est grande et super agréable. Un beau régime de bananes nous attend. Notre 1ère journée sur l'île se termine sur un bon plat de spaghettis sans la moindre fausse note. Pourvu que ça dure...

Jeudi 19 octobre 2006retour en haut de la page

Préparation sacs Après controle

Bien que le départ soit fixé à 1h du mat vendredi, c'est bien le jour J. Cette journée sera consacrée aux préparatifs des sacs et au repos. Pas évident de faire une sieste avec la pression qui monte mais encore merci Stilnox. Le soir venu, un bon plat de pâtes, un "petit" café ("t'as pas trouvé plus petit comme tasse ?"), on s'équipe et voilà Benoît, un pote de nos années foot installé ici depuis quelques années, qui débarque pour nous amener au départ. Nous avions envisagé le bus de l'orga pour être sûrs d'arriver à bon port mais on fait confiance à Ben. Les filles suivent dans le "picaveau". Nous voilà donc à Cap Méchant. On est en avance, on remarque quelques tentes de raideurs et quelques campings cars qui sont arrivés encore plus tôt pour pouvoir dormir un peu. Pas con. Il est 22h et les arrivées vont s'échelonner jusqu'à minuit. Un petit tour du propriétaire, retour à la voiture pour se reposer quelques minutes et finalement on laisse les filles (jusqu'à quand ?) devant l'entrée des artistes pour contrôle des sacs. Une fois le contrôle passé, toute sortie est impossible, et c'est l'attente du départ dans un parc fermé, rythmée par les groupes et artistes locaux qui se succèdent sur scène (Photos 2 à 4). Une petite brioche et un café nous aideront à patienter: on s'aperçoit que nous sommes installés à côté de Corinne Favre, une des grandes favorites qui a déjà gagné ici plusieurs fois. Elle a l'air sympa et décontractée. Les coureurs arrivent en masse et tout ce beau monde se rapproche de la ligne de départ. On y est pour de vrai !

Affiche officielle
20-21-22 octobre 2006
14e édition de la Diagonale des Fous
143 Kms et 8800m de D+

La 14e édition de la Diagonale des Fous 143 Kms et 8800m de D+: La plus longue et la plus dure jamais courue. Elle devrait se courir en 20h environ pour les meilleurs. Au moins le double, pour Christian et moi bien que l'objectif n°1 soit de terminer sans se détruire ! Ce moment que nous attendions et redoutions, est pour l'instant l'aboutissement de notre petite carrière de footeux reconvertis. On part dans l'inconnu, notre 1er ultra. Nous avons décidé de partir très prudemment: on va "gérer". On prend ça comme une grosse rando. C'est avant tout une aventure d'amis de longue date, qu'on a décidé de partager : nous ferons la course ensemble sauf si un de nous venait à jeter l'éponge.

Vendredi 20 octobre 2006retour en haut de la page

Avant le départ c'est parti !

Cap Méchant, 1h du mat, Le GO en chef lance le compte à rebours repris en coeur par les 2200 "fous" : 10,9,8....1 et c'est parti . Ca se bouscule peu finalement, et on arrive même à repérer les filles sur le bord qui ne manquent pas d'immortaliser l'instant (photo 5). Toute de suite une route assez large permet d'étirer facilement le peloton. Beaucoup de monde pour nous encourager. On trottine quelques kms, on en profite pour enlever notre joli t-shirt "sponsors officiels". Puis on bifurque à gauche entre les champs de cannes à sucre, le chemin s'incline légèrement, on décide de marcher vite, la course sera longue, très longue. Le ciel est fabuleux : pas de lune mais des milliers d'étoiles, un régal pour les yeux ! Très vite des frontales scintillent loin devant : les 1ers sont partis à bloc ! La route forestière qui suit nous parait pas spécialement pentue mais on garde notre rythme de marche rapide, c'est long jusqu'au 1er vrai ravito des Camphriers (km 16, D+ 730m). Une fois ce 1er objectif atteint, les choses sérieuses commencent vraiment : 1ère à droite et la montée de 8 kms vers le volcan qu'on fera à un rythme de grand-mère, ça bouchonne, ça bouchonne et très peu de possibilité de doubler . On sera même arrêtés 20mn à un endroit ! Cette montée est raide et monotone et on y passera la totalité de la nuit ce qui nous permettra de voir le jour se lever sur l'océan (photos 6 et 7). Comme dirait Coluche "Et c'est beau, bon allez, on se casse...".

le jour s'est levé Route du volcan

Déjà quelques coureurs sont au plus mal ! Vomissements, hypo, souffle très court, ça promet. On est bien, vu le rythme, ce serait grave ! Le soleil cogne déjà pas mal sur la crète du volcan : l'occasion d'inaugurer la saharienne. On se dit que finalement c'est pas plus mal d'être montés si lentement bien qu'au ravitaillement de Foc Foc (km 24 km, D+ 2400m ) on compte déjà 1h de retard sur la feuille de route. Ce ravito on l'attendait vraiment : déjà plus de 6h de course, il faut refaire le plein en eau et bouffe, et puis il signifiait la fin de la 1ère grosse difficulté. L'occasion de boire la 1ère soupe et de remettre un peu de crème pour les pieds car je sens déjà un échauffement au petit orteil. Direction Route du volcan (km 30,9 D+ 2530m) où aura lieu le 1er pointage électronique pour le suivi temps réel sur le web (photos 8 à 11). Nous sommes très mal classés mais on s'en fout....
A partir de cet endroit, on recommence à trottiner, tranquilles, à ce rythme on peut apprécier le paysage, pas trop non plus parce qu'il faut faire gaffe où on pose les pieds sur ce sol très très irrégulier. La suite de la balade nous fait traverser la mythique plaine des sables puis rejoindre l'oratoire Ste Thérèse (km 37, D+ 2767m) via la grimpette du rempart des basaltes (photo 12 et 13). On double un groupe de rastas avec une tignasse énorme, ça doit tenir chaud ! Ca fait drôle de les voir là mais c'est super, j'adore ce look de fou (photo 14). On les apercevra souvent d'ailleurs. Appel aux filles pour leur dire de ne pas se presser et ne pas s'inquiéter : on sera en retard à Mare à boue pour notre 1er rdv. On rejoint le ravito du Piton Textor (km 40, D+ 2900m), où la brume s'installe : un bénévole nous la promet jusqu'à l'entrée de Mafate (pour un moment donc !). Je décide de regarder plus sérieusement l'échauffement au petit orteil après le ravito. Un compeed, un bout d'élasto sur l'ampoule naissante et ça repart. Moi qui ai passé 1 mois à m'enduire les pieds matin et soir de NOK pour éviter ça ! aurais-je négligé le petit orteil ? La suite est à profil descendant, on continue de trottiner surtout sur les passages herbeux qui soulagent un peu même si le terrain n'est jamais régulier. Tiens revoilà l'italien, rencontré dans l'avion : "bellissimo"...t'as raison, mon gars, tout le monde est d'accord ! Prochain objectif : Mare à Boue, sans la boue où un repas chaud et normalement les filles nous attendent. Après une partie herbeuse à profil descendant sur laquelle on peut courir (surtout face au photographe, photo 15), la lassitude se fait un peu sentir, et malgré une route descendante en dur, on ne court plus : on marche...comme tout le monde.

Arrivée à Mare à boue

Le croisement avec la N3 est enfin là, la foule en délire nous acclame (j'exagère à peine), les filles sont bien au rendez-vous, appareil photo en main (photo 16). Elles marchent quelques centaines de mètres avec nous, et nous lâchent à l'intersection pour le ravito. Mare à boue (km 50, D+ 3000m), pas mal de raideurs pique-niquent en famille dans les champs ou à l'arrière des voitures, l'ambiance familiale est sympa. Ils sont bien organisés les mecs, on voit les habitués. Ben, nous, on va manger dans un champ aussi (photo 17) mais servis "à la mano" (propre ?) par des militaires. Soupe, poulet, coquillettes, banane, café sont les bienvenus et avalés avec appétit. Je refais le pansement et malheureusement j'arrache le compeed, l'ampoule vient avec...ça promet. De la double-peau fera l'affaire....je l'espère !

Coteau Maigre vers Kervéguen

C'est reparti, on attaque le coteau maigre vers Kervéguen (photo 18) : le rythme est correct, on reprend quelques concurrents, on marche sur des rondins, des racines, le terrain se fait beaucoup plus humide. La brume est maintenant bien installée, dommage pour le paysage. Le chemin devient pénible, on n'avance pas très vite et il nous faut de plus 3h pour atteindre le bivouac de Kerveguen (km 59,5 D+ 3900m) , 10 kms après Mare à boue ! L'ampoule ne va pas mieux., la douleur reste supportable, pour combien de temps encore ? la suite du programme : la vertigineuse descente sur Cilaos (photo 19, vue d'en bas). La 1ère partie se fait prudemment, c'est assez raide et casse-gueule. Gaffe, pas trop droit à l'erreur ! Une plaque commémorative pour un raider décédé en 2002 l'atteste. Ca calme. On reprend un groupe en arrivant sur une des quelques échelles métalliques de la descente. La 2e partie se fera donc encore plus lentement : on restera derrière jusqu'en bas (Mare à Joseph) à un rythme désespérant les cabris réunionnais "on descend moins vite qu'on monte", pas faux....Vue sur Cilaos "tout proche"... Petite halte à Mare à Joseph (km 65,4 D+ 3900m), où nous rejoint une vieille connaissance italienne, qui a profité du rythme escargot pour nous rattraper : les ampoules ne l'ont pas épargné : énormes et nombreuses. Petite pensée pour Patrice qui m'avait bien dit : "En voyant, Cilaos, ne te crois pas arrivé, y a un détour de 2 kms par une ravine" (photo 20). Donc, en avant pour la dernière "ligne droite" avant Cilaos, tant attendue, la mi-course, le départ du semi-raid, surtout un bon repas chaud, des kinés, des podologues, et notre sac d'assistance. Je consulte mon portable que j'avais entendu vibrer un peu plutôt: sms de François qui me dit que beaucoup de monde nous suit au boulot : ça bosse dur les gars ! Je profite d'une portion bitumée pour lui répondre. Cilaos (km 67,6 D+ 3970m), on cherche du regard le fameux col du Taibit, prochaine difficulté mais il est caché dans la brume. Juste avant d'arriver au stade, une dame insiste pour nous offrir des dragées en l'honneur de la communion de sa fille, ça a l'air de lui faire tellement plaisir qu'on ne refuse pas. On a prévu un arrêt au stand de 2h.

Repas chaud à Cilaos

Kinés et podos sont pris d'assaut, trop de monde pour attendre. La nuit tombe. Il commence à faire froid. 17h30 que nous avons quitté Cap méchant. On mange : au menu le traditionnel repas , "Soupe, poulet, coquillettes, Yop à la ...banane, café" (photo 21), la chaleur revient. Récup des sacs d'assistance, on se change, on se couvre, je remplace la double-peau sur l'ampoule, pas belle à voir, nouvelle couche de NOK...On calcule : il reste encore plus d'un "templier" et pas tout à fait la mi-course. Les Templiers, ma référence, la plus longue course que j'ai faite jusqu'à lors entre 65 et 70 kms pour 2800m de D+. Je ne sais pas si c'est très bon ce genre de calcul. Ca va être long, très long même si pour l'instant les jambes vont bien ce qui n'empêche pas quelques étirements. Nous entamons une 2e nuit sans dormir et pourquoi pas se reposer un peu ? on n'a pas vraiment sommeil mais on va visiter les tentes de l'armée pour voir si elles nous inspirent : un mec nous met vite au parfum : "y a du bruit et du courant d'air , il fait super froid". On est calmés ! On trace ? C'est parti. L'arrêt ne fera que 1h15. Un réunionnais très sympa nous tient compagnie quelques instants : on s'arrête pour se désaper un peu, la marche aidant, on s'est vite réchauffés. Une situation inconnue se présente alors à nous : la marche de nuit, quasiment seuls, sur un chemin qu'on ne connaît pas. On manque d'ailleurs de se perdre. Une grosse difficulté se profile : la montée du Taïbit de nuit (800m de D+) nous attend mais pour l'instant on descend pas mal. Si bien qu'avant d'attaquer le fameux Taïbit, on perd 300m de denivelé qu'il faudra donc reprendre. Ca devient agaçant et pénible...on est là pour en chier, on va être servis.. Très haut on aperçoit des frontales qui progressent vers le col. C'est loin et c'est haut ! Tout au loin une lumière plus intensive : le ravitaillement d' Ilet à Cordes (km 74,6 D+ 4350m), début du sentier du Taïbit ? "Non ! t'es fou, pas si loin !" Ben si finalement...ici tout est loin.

On marche maintenant en groupe jusqu'au ravitaillement situé sur la route, au début du sentier qui mènera au col. Beaucoup de monde ici. On commence à voir des mecs dormir sous leur couverture de survie sur les quelques lits présents. On apprend le nom des vainqueurs et nous n'avons pas fait la moitié ! des extra-terrestres ! J'ai faim et je me goinfre. Plein d'eau et ça repart ! Pas mal de monde dans cette montée. Tiens, à la lueur de la frontale, nous reconnaissons une nana impatiente dans la descente de Kerveguen, assise qui téléphone en expliquant qu'elle est à la rue. Nous passons devant la "tisanière" : un groupe de babas propose de la tisane artisanale à côté d'un feu : on ne s'attend pas à trouver ça ici. Il semblerait que ce soit une tradition, je crois en avoir déjà entendu parler. Personnellement ça me dit rien, je ne prends pas le risque de me détraquer le bide. Christian n'est pas chaud non plus, donc pas d'arrêt même si la chaleur et l'ambiance de l'endroit peuvent requinquer un raider en perdition (hein Gino ?) ! La progression est lente, je suis devant, tout va bien pour moi mais Christian commence à accuser le coup. Pas grave, on lève le pied, puis tout d'un coup c'est à mon tour de me sentir vraiment pas bien : ça me fait un peu peur, en 5 sec, je passe d'un état serein à un état très fébrile. Je dois m'arrêter, je sens comme une grosse chute de tension. Je pense à une hypoglycémie, mais il me semble qu'on a mangé très récemment. Mes jambes se mettent à trembler et ont du mal à me supporter. J'ai l'impression que mon rythme cardiaque accélère et je ne prends pas le risque d'avaler un gel "coup de fouet". Je me contente d'un morceau de pain d'épices que j'ai d'ailleurs du mal à avaler : on en profite pour essayer de dormir au bord du chemin...impossible, même pas 3mn ! Il doit être minuit et le col semble être encore loin. On repart très doucement, 2e alerte pour moi et re-arrêt. Après quelques instants de repos supplémentaires, nous reprenons l'assaut de ce putain de col. On en a marre. Vivement Marla ! Des frontales scintillent un peu plus haut, signe que le col n'est pas encore à portée. Petits pas après petits pas, nous y voilà : un panneau pour randonneurs indique Marla 20mn, c'est bon on arrive. Nous apprendrons plus tard que nous venons d'entrer dans le célèbre cirque de Mafate, le paradis des randonneurs. Nuit noire, donc pour la vue faudra repasser...dommage. On en profite pour attendre une fille seule : elle est au plus mal et n'en finit pas de vomir. On l'accompagne jusqu'à Marla : 30 mn ...toujours pas de Marla, c'est quoi ce bordel ? je veux bien qu'on se traine mais là.... L'estimation du panneau a été faite par un cabri de jour en courant, c'est sûr ! On finit par arriver. Il est 1h30, tiens, on est samedi. Nous sommes au pied du Grand Bénare et des Trois Salazes (enfin, il paraît...).

Marla,(km 80,5 D+ 5300m) l'endroit que j'ai le moins apprécié sur cette course. Christian ne doit pas en garder un bon souvenir non plus. Il fait froid. Des papillotes partout en vrac par terre : des raideurs enroulés dans leur couverture de survie qui essayent de dormir malgré l'agitation du ravitaillement, l'arrivée de concurrents et le bruit du groupe électrogène. La nana escortée est déjà écroulée dans un coin. Un mec vomit tranquillement son 4 heures face aux tables du ravitos.... bonjour l'accueil, c'est chouette ici. En fait, l'accueil des bénévoles est très chaleureux : tout le monde a besoin de cette chaleur. Beaucoup de visages livides, des mecs épuisés, le moral dans les chaussettes (c'est notre cas). La tente pour dormir est pleine à craquer. On essaye de s'installer dehors et là, très mauvaise surprise : nos couvertures de survie sont mortes, trop vieilles. On ne savait pas qu'elles avaient une durée de vie limitée. Elles datent de nos début en trail ou raids multisports, 7/8 ans environ. Ca ne se voit pas quand elles sont pliées et emballées. La mienne n'a plus sa face protectrice et part en lambeaux quand je la déplie. Celle de Christian est guère mieux. Elles ont fait toutes nos sorties d'entraînement en montagne.... Bref, je dors sans, à même le sol recroquevillé tel un clochard, Christian arrive à utiliser la sienne tant bien que mal. On s'endort malgré tout (putain de groupe électrogène !) quand je sens (dans tous les sens du terme) quelqu'un me jeter une couverture (qui pue donc) : ça me réveille, je regarde la montre, cool j'ai dormi 10 mn ! Essaye encore...je ferme un oeil quand un mec vient me voir "Michel c'est toi ?" la lumière de sa frontale en pleine gueule ! La bonne humeur me gagne..Allez debout, je dors pas, j'ai froid malgré la couverture au "gasoil" : nous retournons à la tente de ravitaillement : des mecs dorment sous les tables, c'est la fête aux zombies, la nuit des morts-vivants. On essaye de manger un bout.... Je trouve les pâtes froides et dégueulasses : je me force...On retrouve un autre italien, ami du 1er. Assis, le regard un peu vide et blanc comme un lavabo. Il a mal au genou. Il arrive à nous dire qu'il est de Milan. On lui apprend que son ami doit être derrière nous mais vu les ampoules qu'il nous a montrées, pas sûr qu'il ait continué. L'idée d'abandonner nous effleure mais on apprend que pour abandonner faut traverser Mafate (40 kms !) ou revenir à Cilaos, c'est-à-dire refaire en sens inverse ce qu'on venait de faire : l'hélico ne vient que sur avis médical. Nous avons 80 kms au compteur, encore un "templier" devant nous : décidément pas très positif comme pensée ça..., sans sommeil et avec mes ampoules, je le sens pas trop...allez, c'est le moral à zéro qu'on reprend la balade en direction de Trois Roches (km 83,5 D+ 5310m) où on ne s'arrêtera pas. Après une traversée de gué (aidés d'une corde) , nous voilà repartis à marcher à petite allure parmi les blocs. Je n'ai vraiment pas aimé cette partie de nuit, "il me tarde tant que le jour se lève...", j'avais l'impression d'avoir de la brume ou de la poussière devant les yeux. Je mate la montre toutes les 5mn. Les yeux ne demandent qu'à se fermer. J'ai même pris une gamelle et je me suis retrouvé sur le dos dans un buisson, obligé de demander l'aide de Christian pour en sortir. Après plusieurs heures de lente progression, nous voilà enfin au bout de la nuit...malgré la profonde lassitude, on essaye d'apprécier la beauté de l'endroit. 2 réunionnais nous rencardent sur la suite jusqu'à Roche Plate : "tu marches à flanc de la falaise, tu montes un peu, tu redescends, tu remontes, tu redescends...et tu y es" , fastoche pourtant ! C'est ça l'univers de Mafate...

Au dessus de Roche Plate

Nous atteignons Roche Plate (km 88,8 D+ 5700m) après 29h30 de " balade" (photo 22). Nous sommes au pied du piton Maïdo, quelques 1000m au dessus ! Vertigineux. Pointage électronique, puis on apprend qu'on ne peut plus y dormir car il fait jour (un dortoir en dur était prévu pour la nuit) ou alors par-terre sur le coté comme certains sur le bord de la dalle sur laquelle se trouve le ravito. Pas possible pour moi. Je prends quand même le temps de changer la double-peau pour la nième fois ! On s'avance en espérant trouver un endroit peinard pour ronquer. Un rocher sous les filaos en bord de GR fera l'affaire : bingo, on arrive à s'endormir, paraît même que j'ai ronflé, quand tout à coup....un vacarme énorme: un hélicoptère. Mafate, étant inaccessible par la route, c'est le bal des hélicos toute la sainte journée (ravitaillement des ilets, touristes riches et feignants...), sans parler de celui de l'orga (notre réveil) qui filme ! Un coup d'oeil à la montre pour s'apercevoir qu'on a encore dormi 10mn : royal !

Une descente dans Mafate

Il est 7h30, et le soleil commence déjà à bien chauffer. Tartinage de crème solaire, 2 petites photos et on embraye. Juste avant La Brèche (km 90,4 D+ 5890m), une main courante rassure : en effet, à droite c'est le grand plongeon ! On bascule donc sur la descente de la ravine Grand-mère par la brèche, puis quelques lacets plus loin se présente la montée sur l'Ilet des Orangers (km 93,7 D+ 5990m), dont l'école est le lieu de ravitaillement. Une infirmière me resserre l'élasto de l'orteil. On ne s'attarde pas plus, on attaque la descente délicate (photos 23 et 24) jusqu'à la rivière que l'on traversera sur une passerelle. On prend quand même un peu de temps pour admirer les somptueux et vertigineux paysages qu'offre le cirque (photos 25 et 26). Sur nos prévisions nous aurions dû traverser Mafate de nuit, quel dommage, on aurait manqué ça !...on se console comme on peut. Un membre de l'orga nous a dit plus haut que si on doit abandonner (c'est pas l'envie qui nous manque) on peut prendre à gauche vers Deux Bras et la rivière des galets : on s'évite la boucle de 20 bornes très pénibles en suivant le parcours du semi-raid, mais y en a encore au moins pour 2h. Va pour la boucle infernale. Encore et toujours des montées de marches sous un soleil de plomb maintenant. Appel aux filles pour leur dire qu'on va pas très fort : Pascale dit tout ce qu'elle peut pour remotiver les troupes. Un petit coucou au caméraman de l'hélico qui revient, en espérant figurer sur le DVD souvenir...Au bout de 5 kms qui en paraissaient 10, on arrive à Ecole Grand Place les Bas (Cayenne) (km 98.6 D+ 6350m).

Ecole Grand Place Les Bas

33h30 de course, long, très long, interminable : "j'ai vu, je sais ce que c'est, je ne reviendrai plus" , (photos 27 et 28). Un tuyau d'arrosage est là pour rafraichir tous les raiders en surchauffe. Aurère, prochain objectif, que l'on atteindra non sans mal par une succession de montées très raides et de descentes équivalentes à coup de 200 et 300m de dénivelé. Ca tue ! (photos 29 et 30). Des ilets aux noms évocateurs se succèdent : Ilet à Bourse (" tiens, on a tapé les 100 bornes "), La Plaque, Ilet à Malheur...(photos 31 et 32). C'est sur ce tronçon que nous rencontrerons Gino, réunionnais, au prénom italien, au nom chinois à la tête de malgache (c'est comme ça qu'il se décrit) : il nous interpelle "Salut Christian, salut Olivier, ça va les gars ? ouais super, on n'est pas bien là ? belle journée pour une balade". On fera un bout de chemin ensemble en discutant de nos expériences réciproques, c'est sa 3e participation. Des textos arrivent de métropole sur mon portable : encouragements des potos et le classement en direct live : sympa, ça fait chaud au coeur. On descend (photo 33) dans une dernière ravine qui nous permettra d'emprunter une solide passerelle suspendue (1 personne à la fois) avant de remonter (photo 34) vers Aurère (km 108,3 D+ 6963m) et le ravitaillement dans la maintenant traditionnelle école. Le trajet jusqu'à Deux Bras, lieu du prochain gros ravitaillement, se résume à une longue descente dont quelques passages vertigineux à flanc de falaise, (photo 35). Gino nous lâche, bye-bye mec bonne route. L'ampoule me rappelle à son bon souvenir à chaque pas qui provoque un frottement sur le petit orteil : j'en chie grave. On a déjà décidé de jeter l'éponge, on a sommeil, la lassitude nous a envahit. La descente est interminable. Pourtant, je n'arrête pas de me dire que si un podo à Deux Bras arrive à m'arranger, je suis prêt à continuer mais je sens que Christian est résigné et s'est déjà fait à l'idée depuis longtemps. Je veux continuer ! Le Grand Raid se mérite !

Arrivée à Deux Bras

Nous parcourons un petit km en marchant dans le lit de la rivière des Galets et nous voilà enfin à Deux Bras (km 116,7 D+ 7000m), (photo 36). Pointage électronique à l'entrée qui m'oubliera semble-t-il....ça inquiètera famille et amis de ne plus me voir sur le pointage temps réel au côté de Christian. Je file direct attendre mon tour chez les podologues. La sympathique podologue m'explique que j'ai fait une erreur avec le compeed (merci, ça fait un moment que j'ai compris...) et m'avoue que c'est pas beau à voir (vu la douleur, j'en doutais pas) : Elle fait une petite photo souvenir (de mon ampoule, pas de moi ;-) ).... Elle refait un joli pansement, me tartine les pieds avec du Pédi-Relax (j'ai changé de crèmerie !), je change de chaussures (qui m'attendaient dans le sac d'assistance) mais voilà, malgré des chaussettes et un pansement tout propres, la douleur est toujours là, bien là, plus que jamais là. Je rejoins Christian sous la tente pour prendre le repas : enfin du nouveau, poulet ou porc boucané, riz, lentilles. Bien meilleur tout ça. Ca change mais le coeur n'y est plus. Finalement Christian arrive à me convaincre, sans l'ampoule j'aurais poursuivi. Musique à fond et pas de place pour essayer de dormir. On décide d'arrêter là : il est quasiment 17h, 40h se sont écoulées depuis le départ. On estime notre temps restant à 10h avec au menu, la terrible montée à Dos d'Ane (km 122, D+ 7800m), c'est un village, pas un moyen de locomotion...puis entre autres la très raide descente de Colorado (km 138, D+ 8700m) vers l'arrivée au stade de la Redoute à St Denis. 10h de nuit, je repense à la nuit précédente interminable...Nous rendons les armes et les dossards (photos 37 et 38). Le Grand Raid 2006 est terminé pour nous.

Arrivée à Rivière des Galets

Je pense à mes filles à qui j'avais promis la médaille, aux entraînements...j'ai les boules. D'autant plus qu'on avait largement les jambes pour aller au bout. Pas dans les 40h escomptées, mais à notre rythme, on y serait parvenu. J'appelle Pascale et Sabine pour qu'elles viennent nous chercher : Pascale essaye de me remonter le moral et de me remotiver, rien n'y fait. C'est plié. C'est après un périple aussi chaotique qu'inconfortable dans le lit de la rivière entassés à l'arrière d'un 4x4 (photo 39) que nous atteignons le village "La rivière des galets" . Ces dames nous attendent et sont surprises de nous trouver si peu marqués et aussi "frais"... La petite mousse au retour dans la voiture sera quand même appréciée.

Dimanche 22 octobre 2006retour en haut de la page

Avec Gino à la Redoute

Après une bonne nuit de 12h, la matinée est consacrée au rangement des sacs et le midi à un bon restau bien copieux. Les jambes tirent un peu mais pas plus qu'après une bonne journée en montagne. L'ampoule par contre...D'ailleurs j'en compte 3 sur le même petit doigt. Je n'ose pas imaginer si j'avais continué (photo 40). Je trouverai plus tard sur le web, une photo de mon occupation favorite lors de la course (photo 41, prise le 2e jour d'après les chaussettes) La déception est encore bien présente. L'après midi, nous laissons les filles à la plage tandis que nous allons récupérer nos sacs d'assistance au stade de la Redoute. Des concurrents arrivent encore, plus de 60h après le départ...chapeau pour le courage et le mental qui nous ont sans doute manqué. Je trouve l'ambiance à leur arrivée assez décevante. Il n'y a pas trop de monde dans le stade malgré l'heure (14h). Quelques personnes s'affairent devant le trombinoscope des coureurs : (photos 42). Nous ne le signerons pas. Beaucoup de raiders au t-shirt jaune "j'ai survécu" nous rappellent qu'on a abandonné. La bonne nouvelle de la journée (après le restau) , est de retrouver Gino. On immortalise l'instant (photo 43). Il a fini en 45h avec une dernière partie très rapide : il connaît cette portion du parcours par coeur , il a même fait faire un projet à ses élèves sur le Grand Raid (il est professeur des écoles) : ils commencent tôt les bougres, pas étonnant de les retrouver quelques années plus tard bondissant sur les sentiers de la diagonale. La semaine prochaine, notre nouveau pote enchaine sur un triathlon...

Mercredi 25 octobre 2006retour en haut de la page

Aéroport de St Denis. Enregistrement pour Paris-Orly. Mais qui voit-on ? Nos 2 raideurs italiens qui boitent bien bas, la démarche souple du playmobil. Ils se font enregistrer sur une classe supérieure pour avoir plus de place pour leurs jambes. Ils demandent à se faire accompagner en fauteuil roulant ! Incroyable ! Ils ont fini, en 58h. Ils se sont retrouvés à Marla où on avait laissé Christian notre ami milanais, qui nous apprend qu'il a même perdu connaissance ! Ils ont fait le reste du raid ensemble. Claudio s'est fait mal au genou en descendant sur Marla et a fait 60 kms avec son genou abimé et ses ampoules. Christian souffre d'une tendinite au genou et a tous les ongles des pieds décollés ! Claudio nous montre son genou, énorme....Il nous dit qu'il est un habitué de ces longs raids (Afrique, Jordanie...) et qu'il n'abandonne jamais : finir à tout prix, je sais pas si ça vaut le coup. J'ai bien peur qu'il ne recourre pas de sitôt. Bravo pour leur courage en tout cas.

Début novembre 2006retour en haut de la page

J'ai refait la diagonale en écrivant ce compte rendu : j'ai maintenant très envie de recommencer si la course à la surenchère stoppe, si les chiffres ne s'envolent pas. Par exemple, en 2007 l'Ultra Trail du Mont-Blanc (UTMB) envisage + de 160 kms et 9000 de D+. Le jeu: laquelle des 2 sera la plus difficile ? Et dire que certains enchaînent ces 2 épreuves en 2 mois.... Avec un peu de recul, toujours des regrets, néanmoins l'expérience acquise cette année devra me servir. Quelques satisfactions : les contenus des sacs bien pensés (à part la papillote périmée) et l'entraînement qui a été dans l'ensemble bénéfique bien que j'y ferais sans doute quelques aménagements. Hormis la fatigue et les ampoules, pas de bobo durable. Ce qui est sûr : pour passer autant de temps dehors, faudra apprendre à dormir et surtout envisager l'éventualité. En plus d'avoir une couverture de survie en bon état, je prendrais des boules quies : aucune crainte de ne pas se réveiller, l'excitation s'en chargera. Autre solution, le faire plus vite : marcher plus vite, trottiner dès que c'est possible et attrapper les 40 heures. C'est une course de l'extrême mais une expérience extraordinaire que je conseillerais à tout amoureux de la course nature. Par contre, une 1ère expérience du long, un solide entraînement et un moral d'acier (ce qui nous a fait défaut) sont à mon avis un minimum pour s'y attaquer ! Cette traversée de l'île se fait aussi en rando de plusieurs jours et l'idéal serait d'y passer une semaine pour reconnaître le parcours comme le font tous les réunionnais.

Coups de coeur et coups de gueuleretour en haut de la page

Mon expérienceretour en haut de la page

Conseils

Ils sont basés sur la petite expérience personnelle que j'ai pû acquérir sur les quelques trails longs que j'ai courus. Chacun doit se faire la sienne, c'est ce qui permet d'avancer et de progresser. Je pense que ce sont des conseils de bon sens et qui peuvent sembler évidents pour ceux qui pratiquent déjà. Ami coureur ou trailer expérimenté tu peux passer ton chemin, tu n'apprendras rien.

Pendant la course

Préparation

Pour mon 1er ultra, l'objectif était de terminer sans encombre et pas mettre 6 mois ou plus à s'en remettre. A moitié atteint donc, mais ce n'est pas dû à une mauvaise préparation physique. Plus l'échéance approchait, plus la hantise de la blessure était présente. La fin septembre a été très pénible pour nous (Christian est d'accord avec moi): il nous tardait que l'échéance arrive. Quand la lassitude gagne, c'est dur de se motiver pour faire une virée en montagne quand la météo n'était pas optimiste: je me rappelle une certaine sortie au Valier mi-septembre où on a marché dans l'eau ruissellante sur tous les chemins et où on a été bloqués par la neige !

Ce que je changerais à la préparation...

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